Va-t-on vers la création d'un super-état?
C'est la crainte, par exemple, des Britanniques qui n'ont signé ce
projet de traité qu'avec beaucoup, beaucoup de réticence et en
vertu, en vérité, d'un rapport de force établi par la France et
l'Allemagne, principalement, pas uniquement mais principalement au
sein de la Convention qui a préparé ce texte. C'est la crainte des
Britanniques et elle est en partie justifiée puisqu'ils sont
fondamentalement hostiles, eux, à toute évolution fédérale. Ils ont
raison, je le crois, de craindre une évolution fédérale introduite
par ce traité. Pourquoi? Parce que, encore une fois, quand l'Union
se dote d'un chef d'Etat, Président du Conseil européen, d'un
ministre des Affaires étrangères, d'un Parlement qui devient un vrai
parlement, ça ressemble de plus en plus à un véritable pays. Alors,
peut-on dire, même du point de vue d'une personne ou d'un pays
hostile à toute évolution fédérale, qu'on va pour autant vers un
super-état? Eh bien vous noterez comme moi que l'expression de
super-état, c'est fondamentalement péjoratif. On voit tout de suite
une bureaucratie tatillonne qui règle tout -pourquoi pas Orwell?-
enfin je ne sais pas, moi, etc. Non, on en est très loin, d'abord
parce que les états qui composent l'Union européenne sont des
démocraties, que je sache, et deuxièmement parce que les
institutions qu'ils proposent de donner à leur union sont au
contraire de plus en plus démocratiques et non pas de moins en moins
démocratiques, avec l'affirmation, surtout, il faut le marteler, le
répéter, du rôle du Parlement. Alors, oui, c'est de plus en plus un
état fédéral, tant mieux aux yeux des fédéralistes, tant pis aux
yeux des Britanniques, et de tous ceux... -parce qu'il n'y a pas que
les Britanniques qui sont hostiles à une union fédérale dans l'Union
européenne. Mais un super-état, sous-entendu une abominable
dictature, non, certainement pas, bien au contraire.
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