Bien sûr que l'élection de George Bush et surtout le 11
septembre ont radicalement changé l’Amérique. La liste de
ces changements est longue. Avant les élections, la dernière
élection présidentielle et le 11 septembre, le budget
américain n’était pas en déficit. Aujourd’hui, l’Amérique
est repartie dans des déficits budgétaires absolument
gigantesques ce qui pèse naturellement à la fois sur
l’économie américaine et l’économie du monde. Cette
conséquence-là n’est pas négligeable.
Deuxièmement, du temps de Bill Clinton, et avant, du temps
de George Bush père, les relations entre les Etats-Unis et
leurs alliés européens connaissaient naturellement des
problèmes comme dans toute alliance, mais il n’y avait pas
cette tension entre plusieurs et non des moindres des
gouvernements européens et les Etats-Unis et surtout cette
rupture radicale que montrent tous les sondages entre
l’opinion européenne et les Etats-Unis de George Bush.
Cette deuxième conséquence a des implications gigantesques
sur l’équilibre international dont on ne voit encore que le
début des conséquences. Et puis surtout, et puis surtout,
George Bush a inventé ce qu'il appelle une nouvelle
politique de sécurité. C'est-à-dire, cette idée que les
Etats-Unis doivent se lancer, (si nécessité il y a, bien
sûr) dans des guerres préventives y compris sans l'aval de
l’ONU voire contre l’ONU. C’est un troisième changement qui
est absolument radical et qui est porteur d'une grande
question et en vérité de grands dangers. Alors maintenant
est-ce que ces changements sont durables? Ecoutez, un
déficit budgétaire on revient dessus, des tensions entre
alliés, on revient dessus, une stratégie on revient dessus.
Mais au-delà de cela, il y a une évolution historique qu'on
ne peut pas négliger.
Depuis la fin de la guerre froide, on voit bien que les
intérêts économiques, politiques de l’Europe et des
Etats-Unis ne sont plus forcément les mêmes et qu'en vérité
ils divergent de plus en plus, pour au moins deux
raisons, c’est que l’Amérique économiquement parlant, est
tentée par la conquête de nouveaux marchés, et ces nouveaux
marchés ils ne sont pas en Europe. Ils sont en Asie et
principalement en Chine, et la deuxième raison, c’est que
dans les plus grandes difficultés, les plus grands
questionnements, mais enfin malgré tout, l’Union européenne,
l’unité Européenne s’affirme et que virtuellement l’Union
européenne et les Etats-Unis sont les deux grands rivaux des
puissances égales du monde développé.
Est-ce que l'on revient là-dessus? Alors, ça c’est beaucoup
plus difficile parce que ça ce sont deux réalités qui ne
tiennent pas à des hommes, à tel ou tel président. Alors on
canalise cela ou on ne le canalise pas. Et c'est là qu'est
la très grande différence.
Qu’est ce qui se passerait si John Kerry était élu,
succédait à George Bush? Bien, d’abord je vous dirais que,
paradoxalement, je pourrais presque dire que il ne faut pas
souhaiter à John Kerry d'être élu. Parce que s'il l'était,
ce qui n'est pas le plus probable aujourd’hui, il hériterait
d'une situation tellement désastreuse que même s’il était
superman il aurait un mal considérable à la gérer. Et puis
deuxième remarque, si John Kerry est élu, les Européens, et
tout particulièrement l’Allemagne et la France vont se
trouver dans une situation très embarrassante. Parce que
John Kerry, avec des manières extrêmement policées, son
naturel, sa culture, va se tourner vers Europe en disant :
'Écoutez, je sais très bien que nous, les Américains, avons
fait une gigantesque erreur avec cette guerre en Irak mais
aujourd’hui nous sommes, que vous le vouliez ou non, dans le
même bateau, et il va falloir que vous nous aidiez à nous
sortir de là. Et là l’Europe va être -serait, si John Kerry
était élu, très très embarrassée.
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